Movement Iki

Mon retour sur deux lattes avait comme but initial de me remettre aux randos hivernales et ainsi conserver le semblant de condition physique que la pratique régulière du VTT me permet d’acquérir à la belle saison. Objectif atteint mais légère frustration pour l’adepte de glisse que je suis, devant le manque de plaisir généralement offert par les descentes de fin de rando. La faute, en premier lieu, aux qualités très variables et pas toujours favorables des différents manteaux neigeux rencontrés, mais aussi à un matériel un peu trop orienté « ascension ». Sans aller dans l’extrême, j’avais opté pour du léger, Dynastar Altitrail Vertical avec fixations et chaussures Dynafit, dans le but de mettre toutes les chances de mon côté face à l’entrée en matière parfois rébarbative du ski à peaux. Après une saison et demi, pas mal d’expériences enrichissantes et de discussions intéressantes, il était temps de ne plus considérer que le côté physique pur de l’activité et de commencer à s’intéresser à son aspect « ludique ». Et apparemment, à en croire les nombreux échanges lus un peu partout sur les forums dédiés à cette activité, cette ouverture vers la rando-plaisir n’est pas un cas isolé. Visiblement, la récente migration de certains snowboarders ou skieurs devenus allergiques aux pistes surfréquentées provoque un véritable appel d’air dans le petit monde du ski-rando. Les acteurs majeurs de ce secteur n’ont pas tardé à réagir à cette demande accrue et plus diversifiée. Tous les fabricants proposent aujourd’hui dans leur gamme touring des modèles mieux adaptés à la descente, spatules et patins plus larges. Les skis « allumettes » côtoient encore et toujours les « fils de fer » spécial compétition, mais les « fats » et « mid-fats » légers sont de plus en plus nombreux sur le marché, pour le plus grand bonheur des randonneurs « nouvelle génération ».
Pour ma part, un peu par conviction, un peu par chauvinisme et beaucoup par ouï dire, j’ai rapidement orienté mon choix vers la marque Movement pour trouver des successeurs à mes Dynastar-allumettes. Cette jeune marque helvétique qui a déboulé dans le giron du ski en 2002 sous l’appellation « The Swiss Freeski Company » ne recueille, depuis, pratiquement que des louanges, aussi bien de la part des magazines spécialisés, que des riders de tous styles et de tous niveaux. Une telle unanimité surprend autant qu’elle incite à s’intéresser aux produits concernés. Après quelques hésitations, l’évidence des chiffres m’a convaincu :

Movement Iki 168
Type : Mid-Fat
Largeur spatule : 117 mm
Largeur patin : 80 mm
Largeur talon : 105 mm
Rayon de courbure : 20 m
Poids de la paire : 2850 grammes (en 168 cm)
Construction : sidewall cts light, fibre light dynamic tri axial, noyau bois okume-karuba-peuplier, semelle P-tex4000

Alors que j’attendais mes Iki dans leur fluorescente livrée verte et jaune, je les ai finalement reçus en vert… et blanc, sobres et très classes, pour leur nouveau millésime 09/10. Qu’importe le flacon, dès les premiers hectomètres de piste, les Iki révèlent un potentiel incroyable et un caractère étonnant. Stables, progressifs et précis, ces skis donnent immédiatement confiance et incitent insidieusement à augmenter en permanence sa vitesse. Cette impression initiale ne se dément jamais loin des domaines skiables. Quelle que soient les qualités de neige, le Iki aime skier vite. Accrocheur sur le dur, rassurant dans le « croûté » et hallucinant dans la poudre, ce ski adore les grandes courbes et cherche inlassablement à se relancer d’un virage taillé vers le suivant. Même avec des Dynafit TLT et des chaussures typées rando, l’impression de stabilité et de puissance reste incroyable et l’envie d’augmenter le rythme, omniprésente. Attention donc, loin des vastes pentes vierges ou sur des fins de rando forestières, le généreux tempérament du Iki demandera à être bridé. Loin d’être caractériel, il se pliera de bonne grâce à votre allure réduite, mais n’offrira alors plus tout son formidable potentiel. Toujours facile, encore maniable, il y sera pourtant beaucoup moins vivant et réactif que certains skis plus étroits et vifs.

Qui dit skis « mid-fats », dit aussi ascensions plus exigeantes. Le poids est évidemment le premier critère confortant cette affirmation. 1.70 kg vérifiés pour le duo Altitrail/TLT, 1.94 kg pour le Iki/TLT Vertical. Même si la barre fatidique des 2 kg n’est pas atteinte, les 240 grammes supplémentaires au bout de chaque pied se font inévitablement ressentir, particulièrement sur les longues ascensions (D+ >1’500 m) ou, plus généralement, sur les derniers hectomètres du dénivelé à vaincre. Le deuxième critère susceptible de pénaliser le Iki à la montée, est sa largeur au niveau de la spatule. Selon la qualité de neige et la dureté des bords de trace, les skis auront tendance à frotter et à augmenter l’effort nécessaire pour les faire avancer. En dévers, par contre, leur relative souplesse de spatule n’est pas aussi pénalisante qu’on pourrait le penser, tant la rigidité et l’accroche du patin est incroyable, surtout avec des peaux spécifiquement taillées pour les généreuses formes du ski.

Tout dans la vie est affaire de compromis. Le ski ne déroge pas à cette règle et le Movement Iki sera un formidable compagnon de rando pour autant que vous ne privilégiez ni le chrono, ni la facilité d’ascension à tout prix. Il vous redonnera le sourire aussitôt que vous aurez rangé vos peaux au fond du sac à dos et vous offrira énormément de plaisir et de confiance dès que l’inclinaison de la pente s’inversera. Personnellement, sur ces lattes, j’ai retrouvé beaucoup de sensations qui ont contribué à mon long attachement au snowboard : griserie et stabilité de la vitesse, facilité et souplesse du carve, et surtout, force et puissance des virages sur l’angle rendant nombre de neiges exigeantes, plus faciles à skier.